Présentation Générale : De Fer et de Bois

Muscles de métal pour visage, forêt pour cheveux, bras de fer et gueule de bois, bonhomme en pleine grasse matinée ou danseuse, trapéziste, amoureuse descendue de sa branche et pailletée d’étain. Le sculpteur règne sur un peuple fait d’un alliage de plomb et de racines, un royaume recyclé par utopie ou par amour.  La soudure lui sert de caresse. Dans l’écorce, son couteau esquisse un sourire. Il faut l’imaginer face au bric-à-brac de branchages et de boulons, de natures mortes et de pots d’échappements en attente de réincarnation : c’est un bec pour l’oiseau, un bras sur une hanche, la trace d’un geste qui hésite entre l’animal et l’humain. Parfois le sculpteur forge un bois tendre comme une bête, d’autre fois c’est un fer tordu comme le destin, improvisé. Il s’agit de laisser faire la main, de laisser éclore un œil à l’entrée d’un tuyau, une bouche dans une souche. Et, dans la rencontre entre le métal et le bois, dans l’étreinte provoquée des éléments, quand la matière n’est plus première ni seconde, il est possible qu’on assiste à la conception d’un enfant qui nous apprenne quelque chose sur le monde.

De quoi sera-t-il l’héritier, cet enfant de sculpteur qui cherche nourrice dans le regard ? De pentes montagneuses, impassibles, qui nous confrontent à l’éternité toute nue ? De machines, d’outils, de véhicules anciens qui nous ressassent la complainte de l’ouvrier, de la folie qui gagne à grande vitesse les civilisations  mécanisées ? Car si le sculpteur enfante c’est dans la douceur. C’est dans le désir de refaire le monde, en bricolant l’oiseau, le dieu, la femme, l’étrange animal.

Peut-être alors dans ces figures de fer et de bois, ce n’est pas le souvenir de la matière que l’on cherchera, mais bien quelque chose comme un cœur qui bat, qui n’est plus ni le feu, ni la sève, mais la promesse d’une grasse matinée, d’une utopie, d’un amour.

Julien Bondaz